J'ai décidé de sortir un peu aujourd'hui, j'ai écouté la météo et, sachant qu'il va faire beau, je n'ai pas hésité. J'ai revêtis un petit haut et une longue jupe. J'ajoute mes petites sandales à la tenue et mets mes grandes lunettes de soleil. J'attrape un petit bout de papier puis cherche maladroitement un bic pour prévenir Sophia, ma colocataire, que je suis partie me baladée. Elle serait capable de s'inquiéter pour moi et je n'ai pas envie de lui faire peur! Je sors en prenant ma canne, je ne mets pas de veste, je ne suis pas vraiment frileuse.
Je me promène sans but spécial, je ne sais pas vraiment où je suis, j'ai beau être à Londres depuis 5 ans, je ne connais pas encore tous ses quartiers! Je marche depuis une demi-heure, c'est le seul "sport" que je sais pratiquer et encore, il m'arrive de tomber ou de me prendre quelque chose. J'essaye de me repérer mais je n'y arrive pas, c'est encore plus dur pour les aveugles d'avoir le sens d'orientation. Je suis un mur à ma gauche à l’aide de ma canne en espérant que ce soit celui d’un bâtiment ayant une pancarte qui m’aiderait à me repérer. Le mur finit par s’arrêter et je passe à l’intérieur de celui-ci, je suis un petit chemin en gravier et ma canne m’aide à savoir qu’à côté de ce chemin se trouve de l’herbe.
Je continue de marcher, un peu plus lentement, pour réfléchir. Je pourrais me trouver dans un parc maintenant, il faudrait que je sache quel parc. Je suis à une demi-heure de chez moi et j’ai probablement quitté Camden, le quartier à côté est Hampstead… J’ai déjà entendu parler d’un parc assez grand se trouvant dans ce quartier. Il y a de grandes chances pour que ce soit là où je me trouve en ce moment. Je m’éloigne un peu du sentier et replie ma canne. Grosse erreur parce que la seconde d’après, je me prends un banc en fer, j’entends des murmures qui viennent de juste à côté de moi, probablement des gens assis sur le banc. Je baisse mes yeux bleus clairs, personne ne peut les voir de toute façon. Je reprends maladroitement ma canne dans mon petit sac et la déplie avec déception. Je n’aime pas être dépendante à cet objet et je n’arrive pas à me dire que sans elle, je ne pourrais pas m’en sortir.
Je recherche lentement le chemin et retourne dessus en passant à côté du banc. Je me retiens de soupirer tandis que les personnes assises continuent de chuchoter. Les gens peuvent être tellement égoïstes ! Ils ne peuvent pas savoir ce que c’est de ne pas voir, d’être incapable de savoir si quelqu’un approche de vous ou qu’un ballon tombe sur vous. Ce n’est pas facile tout les jours et ça ne le sera jamais…
Je m’arrête au milieu du sentier, immobile, quelqu’un me bouscule, assez violemment je dois dire. Je perds presque l’équilibre mais arrive à ne pas tomber. La personne ne s’est même pas arrêtée pour m’aider… Il faut que j’arrête de me dire que les gens sont gentils, le monde est cruel Margo, peut-être que c’est pour ça que tes parents t’ont séquestrée… Je secoue la tête, s’ils m’avaient laissé aller à l’école, je me serais habituée à la cruauté du monde et je ne serais pas aussi perdue que je ne le suis maintenant. Je passe une main dans les cheveux et continue mon chemin. J’entends le rire d’enfants qui jouent, je n’arrive pas à savoir à quoi mais ils ont l’air de bien s’amuser. Je m’arrête une nouvelle fois mais me place sur le côté. Ils s’amusent juste à côté de moi et je souris doucement, j’aimerais pouvoir les voir, observer leur jeux, leur vêtements. Je retiens à nouveau un soupire. J’entends un bruit, comme quelqu’un qui shot dans un ballon, je me tourne légèrement pour savoir où le ballon va atterrir. Je ne l’entends pas retomber, soit il est très haut et il tombera encore plus fort, soit je me fais des idées et il n’y a jamais eu de ballons.
Je panique un peu mais essaye de rester impassible, les gens se moquent déjà d’une aveugle alors qu’elle serait leur réaction devant une aveugle en pleine crise de panique ? Je sens que quelque chose passe devant moi et j’entends un bruit sourd. Je sens quelqu’un est à côté de moi, je ne comprends pas vraiment ce qu’il se passe et je tourne la tête vers l’endroit où je crois qu’il y a quelqu’un.
-Qui est là ?